
Vous avez deux yeux, mais vous ne regardez que d'un seul côté.
L'idée n'est pas nouvelle, mais le concept de « vision à deux yeux » a été formulé par l'auteur et aîné mi'kmaq, le Dr Albert Marshall (ou Etuaptmumk en langue mi'kmaq). La vision à deux yeux met en valeur les atouts de la science occidentale et du savoir autochtone au profit de tous : les poissons, les humains et la planète. En bref, on peut définir le savoir autochtone comme une relation cumulative de sagesse, de croyances et de pratiques entre les êtres vivants et leur environnement, qui évolue par transmission culturelle. Ce concept nous permet de reconnaître les défis posés par l'héritage persistant du colonialisme, mais aussi de jeter les bases de la résilience.
Quand on va à l'école et qu'on apprend les sciences, on n'apprend qu'une seule façon de faire des sciences. De toute évidence, la science et la gestion des pêcheries conventionnelles reposent essentiellement sur un paradigme occidental et eurocentré. La vision hiérarchique du monde propre à la pêche occidentale donne l'illusion que la nature est prévisible et contrôlable, ce qui aboutit à un système mondial largement défaillant sur les plans social et écologique. Parallèlement, les pêcheries autochtones sont souvent guidées par une éthique de durabilité plutôt que par la simple recherche du profit. La pensée systématique occidentale se veut quantitative, analytique et factuelle, tandis que les pratiques autochtones privilégient la qualité, la durabilité et l'intuition. La science seule ne sauvera pas le monde naturel ; seul un changement d'attitude et de mentalité le permettra. Si un système hiérarchique où les uns sont surpassés par les autres n'avait pas autant d'importance, et si nous traitions les poissons comme nous, nous serions plus à même de protéger notre bien-être présent et futur – celui de tous les êtres vivants.
Les soins aux personnes sont une question de double vision. La formation médicale joue un rôle crucial dans la préparation de l'avenir de notre système de santé. Alors que nous faisons progresser nos soins de santé grâce à une recherche intégrée et novatrice, cette double vision s'avère également bénéfique en médecine pour répondre aux besoins de santé actuels et émergents de notre communauté. Nous pouvons y parvenir simplement en comprenant notre lien avec le territoire et la géographie, l'autodétermination, la réconciliation et la langue. La prise en compte de ces éléments dans notre démarche nous permettra de lutter efficacement contre les inégalités en matière de santé et d'offrir des soins cliniques performants. Nous exprimons notre profonde gratitude envers nos responsables de la formation médicale, le corps professoral autochtone et les organismes partenaires qui contribuent à l'apprentissage et à l'action en faveur des communautés autochtones et de la santé de tous.
Plus que jamais, les chercheurs en santé encouragent leurs collaborateurs à combiner les atouts de la science occidentale et des approches autochtones. Il est prouvé que ces approches améliorent non seulement le développement et la santé des enfants autochtones, mais profitent également à toutes les étapes du développement de l'enfant. On le dit souvent : il est conseillé que l'environnement éducatif de l'enfant favorise l'immersion dans les connaissances, la langue et la culture traditionnelles autochtones. Or, c'est plus souvent dit que fait. En intégrant davantage la perspective d'une interconnexion totale au sein du petit enfance, on pourrait contribuer à réduire les maladies comme les troubles mentaux et les maladies cardiométaboliques. L'intégration des atouts des connaissances autochtones et des méthodes scientifiques occidentales permettra d'évaluer les programmes existants en matière de santé infantile et de parentalité, et ce, dans le cadre de l'élaboration et de l'évaluation de nouveaux programmes. En somme, il est stimulant pour notre communauté de voir les perspectives et les approches autochtones placées au cœur de la recherche en santé ! En appliquant des savoirs ancestraux, nous créerons le soutien et le leadership nécessaires pour tirer parti d'une longue tradition de recherche et promouvoir une défense éthique des intérêts dans les services de santé publique.
En tant que société, nous devons inviter chacun à pratiquer la vision à deux yeux. Par la création et l'assemblage de formes et de perspectives diverses, nous bâtissons ensemble un tout nouveau. S'il est possible de combiner la richesse des approches scientifiques des Premières Nations et de l'Occident, nous ne devons pas oublier de nous ouvrir aux autres systèmes de valeurs, croyances et connaissances culturelles. Il ne s'agit pas de fabriquer un crayon pour les yeux, mais de façonner une nouvelle perspective grâce à ce crayon. La prochaine fois que vous porterez SUSTAIN Eyes, essayez de regarder avec vos deux yeux. Accueillez la richesse des perspectives multiples.
Amour,
L'équipe de Cheekbone Beauty
Sources : Etuaptmumk : Two-Eyed Seeing , Plant Institute , « Two Eyed Seeing » : An Indigenous framework to transform fisheries research and management , FNHA , Université de la Saskatchewan